L’histoire de Sana, de son nom d’emprunt, est tellement complexe qu’elle rappelle certaines séries américaines autour des organisations djihadistes. Née à Roubaix de parents algériens, elle n’a toutefois jamais eu la nationalité française. Les confrères de France 3 expliquent qu’à l’âge de 13 ans, elle souhaitait l’obtenir. Elle pouvait y prétendre étant née en France, mais sa mère a refusé cela. Ce qui fait qu’elle est effectivement expulsable !
Cinq ans « en famille » avec Daesh
Après avoir passé cinq ans, avec sa famille, au sein de l’organisation terroriste État islamique, entre 2014 et 2019, elle a été arrêtée et placée dans des camps tenus par les Kurdes. En janvier 2023, à sa demande, elle est rapatriée en France avec ses deux filles, nées sur le territoire syrien d’un mariage qu’elle qualifie de « forcé » avec un chef djihadiste belge.
Elle aurait été ainsi « violée à partir de 15 ans », puis mise enceinte deux fois, à l’âge de 16 et 18 ans. Actuellement, les deux enfants suivent leur scolarité normalement dans des écoles roubaisiennes, une au CP (âgée de 7 ans) et l’autre à la grande section de maternelle (âgée de 5 ans).
Après son retour en France, elle n’a, d’ailleurs, pas été inquiétée par la justice. Dès la fin de sa garde à vue, elle a été libérée sans mise en examen. Restée sous surveillance, avec l’application du dispositif MICAS (Mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance), celle-ci a été levée le 26 juillet dernier, selon Radio France, qui précise que « l’avis de procédure d’expulsion, lui, date du 21 août ».
Vraie repentance ou taqiya ?
Une telle vie tragique, marquée par des violences physiques et morales ainsi que 9 ans de « séquestration », ne convainc visiblement pas la préfecture du Nord, basée à Lille. Le préfet Georges-François Leclerc veille lui-même à son expulsion vers l’Algérie, son seul pays de nationalité, arguant qu’elle représente une « menace grave pour l’ordre public ». Les autorités locales craignent que Sana n’ait pas véritablement abandonné son passé et passif avec Daesh.
Cependant, sans preuves tangibles, ses accusateurs d’être « encore une radicalisée », se basent sur certains éléments à charge : ne pas « condamner fermement » les actes de terrorisme islamiste, attitude « élusive » avec certains enquêteurs, déclarations et comportements « ambigus », « rires » au sujet des décapitations, etc.
Faisant le déplacement personnellement au tribunal judiciaire de Lille, aujourd’hui, afin de plaider auprès de la commission d’expulsion l’« éloignement » de Sana vers le territoire algérien, le préfet Leclerc a provoqué la colère de l’avocate de la défense, Me Marie Dosé, qui a évoqué une procédure « sans fondement » et « honteuse ». Quant au haut fonctionnaire, il doute fortement de la sincérité de la repentance de la jeune maman parlant d’« une stratégie de dissimulation ». Il fait évidemment allusion à la fameuse taqiya, mot très répandu en France ces dernières années, qui renvoie à une recommandation de certains prédicateurs djihadistes à leurs adeptes de cacher leurs convictions religieuses afin de tromper l’ennemi.
La commission compétente rendra son verdict le 27 septembre, dont le caractère est consultatif. Le préfet aura la liberté de suivre son avis ou pas. Quoi qu’il en soit, vu le contexte de cette affaire, ce n’est pas du tout sûr que les autorités algériennes acceptent de délivrer un laissez-passer consulaire qui permettrait d’exécuter une éventuelle décision d’expulsion.