Produits alimentaires : Retour progressif au monopole de l’Etat en Algérie ? 

Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC)
Officiellement le marché algérien est libre, répondant à la règle de l’offre et de la demande, hormis pour ce qui est des produits subventionnés par l’Etat (blé pour le pain, lait en sachet, etc.). Néanmoins, ces toutes dernières années, la liste des produits dont les prix sont fixés administrativement tend à s’élargir.

Officiellement le marché algérien est « libre », répondant à la règle de l’offre et de la demande, hormis pour ce qui est des produits subventionnés par l’Etat (blé pour le pain, lait en sachet, etc.). Néanmoins, ces toutes dernières années, la liste des produits dont les prix sont fixés administrativement tend à s’élargir.

Ce mercredi, 13 septembre, le ministre de l’Agriculture et du Développement rural, Mohamed Abdelhafid Henni, a affirmé que « les prix des légumineuses ne changeront pas », et que ceux-là « seront fixés par l’Etat et ne connaîtront aucune augmentation ». Cette décision est prise à la suite de la hausse, ces derniers mois, des prix des légumes secs et du riz, passant du simple au double.

Monopole de l’OAIC pour l’importation des céréales et des légumes secs

Ladite hausse est intervenue peu de temps après que les autorités aient accordé, au mois de février dernier, le monopole de l’importation à l’organisme public, Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC). Dans une note adressée, le 9 février 2023, aux banques et établissements financiers, l’Association des banques et des établissements financiers (ABEF) les a informés de « l’exclusivité d’importation des légumes secs et du riz par l’OAIC et de l’interdiction de leur importation par d’autres opérateurs, et ce, que ce soit pour la revente en l’état ou pour usage propre »

Cela a été réaffirmé, mardi 12 septembre 2023, lors d’un Conseil des ministres. « Poursuite de la subvention par le Gouvernement des prix de plusieurs produits de première nécessité importés et interdiction de toute opération d’importation des légumineuses, en dehors de l’OAIC, avec détermination précise des étapes de fixation du prix du produit », a indiqué un communiqué de la Présidence algérienne. 

Mettant en cause à chaque fois la « spéculation », qui serait derrière les multiples pénuries ou hausses des prix qui touchent périodiquement des produits de premières nécessités, le gouvernement tente de maîtriser le marché, notamment en récupérant certaines filières. Hier, Henni a annoncé « l’ouverture progressive de points de vente (des légumineuses, ndlr) au niveau de toutes les communes du pays, afin de pouvoir vendre directement au consommateur par l’OAIC ».

Vers la généralisation du plafonnement des prix des produits de première nécessité

Il faut noter, à cet effet, qu’après le lait en sachet et le blé pour le pain, les autorités ont décidé, depuis 2011, de plafonner les prix de l’huile et du sucre. Une compensation est octroyée chaque année aux fabricants pour supporter la différence entre le prix à la production et le prix de vente. Même chose aussi pour ce qui est de la farine et de la semoule. 

Dans le chapitre « règlementation des prix des biens et services », le ministère du Commerce cite, sur son site internet, pour ce qui est des produits alimentaires, l’huile et le sucre blanc, les semoules de blé dur, le lait pasteurisé conditionné en sachet, la farine de panification de pains et l’eau potable d’assainissement, et ce, en se référant à des décrets exécutifs. Dans le cas des légumineuses, il est clair que cela passera inévitablement par un nouveau texte de loi. 

Entre temps, les autorités mettent en place périodiquement, comme c’est le cas durant le mois de Ramadhan, pour les produits alimentaires ou encore à l’occasion de la rentrée des classes, pour les fournitures scolaires, des « expositions », destinées à la vente directe producteur/fabricant – consommateur. Par ailleurs, les descentes des agents de contrôle des directions de commerces, souvent accompagnés d’éléments des services de sécurité, se font de plus en plus nombreuses. Tout cela dans un marché dominé par l’informel, les commerçants, y compris ceux de gros, exerçant le plus souvent sans facturation. 

Réduire la facture algérienne des importations coûte que coûte

Ce retour « progressif » au monopole de l’Etat sur certains segments de l’économie qui est justifié, au-delà de la volonté de « lutter contre la spéculation » réaffirmée à maintes reprises, par le souci de réduire la facture des importations. Toutefois, certaines interdictions d’importation sont levées de temps à autre, comme c’est le cas tout récemment avec les viandes blanches et rouges afin de « contribuer à la réduction de leurs prix »

D’autres décisions, dans ce chapitre, soulèvent des incompréhensions, notamment de la part de certaines organisations patronales, à l’image de la Confédération générale des entreprises algériennes (CGEA), dont la présidente, Saida Neghza, avait réclamé, dans la correspondance qu’elle a adressé au président Abdelmadjid Tebboune, le 5 septembre dernier, une « commission d’enquête chargée de déterminer comment sont délivrées les licences d’importation et les quotas »

Sur un autre plan, les opérations de contrôle ont poussé certains opérateurs, spécialisés dans le stockage par exemple, à ne plus constituer des réserves, ce qui augmente le risque de pénuries et par conséquent fait flamber les prix.

C’est pour cela, d’ailleurs, que lors de ce dernier Conseil des ministres, le président algérien a exigé d’« associer les walis (préfets, ndlr), en leur qualité de responsables du secteur économique, en vue de faire la distinction entre le stock dans le cadre de la chaîne de production et le stockage aux fins de spéculation »

Les autorités semblent chercher la formule idéale pour réduire la facture des importations, tout en garantissant la disponibilité des produits, et ce, en optant si nécessaire à un retour au monopole de l’Etat, rappelant une ère pourtant révolue.

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